Usufruit temporaire de parts de SCI : la CAA contredit le comité de l’abus de droit

La Cour administrative d'appel, dans le cadre d'une affaire dans laquelle nous représentions les contribuables, vient d'annuler un redressement fondé sur un abus de droit.

Cette affaire concernait des contribuables qui avaient constitué des SCI avant de céder l'usufruit temporaire des parts de celles-ci à une société holding qu'ils détenaient indirectement. A la suite de la cession de l'usufruit temporaire, des augmentations du capital des SCI ont eu lieu afin de financier l'acquisition d'immeubles générant des revenus. La holding libérait bien son capital à l'inverse des nus-propriétaires. Des emprunts étaient contractés pour compléter le financement des opérations.

L'administration estimait que ces opérations constituaient un abus de droit et avait alors imposé les contribuables comme si la cession d'usufruit temporaire des parts n'avait pas eu lieu. Ainsi, les nus-propriétaires avaient été imposés sur les revenus fonciers générés par les SCI. Les amortissements et les intérêts qui avaient été déduits par la holding avaient été réintégrés dans son résultat fiscal par l'administration. Des pénalités de 40 à 80% avaient également été appliquées.

Le comité de l'abus de droit fiscal, dans des avis rendus lors de la séance du 15 novembre 2019 (avis n°2019-42 et s.) avait estimé que l'administration fiscale pouvait bien mettre en œuvre la procédure de l'abus droit car les opérations constituaient un montage artificiel et qu'elles avaient un but exclusivement fiscal (le comité avait confirmé sa position dans le cadre d'une deuxième saisine lors du contrôle fiscal d'années postérieures : avis n°2024-14 et s., séance du 14 novembre 2024).

La Cour administrative d'appel de Paris, le 28 mai 2025, a annulé le redressement.

Elle estime tout d'abord qu'il n'existe pas de montage artificiel car :

- si l'administration estime que constitue un montage artificiel l'ensemble des opérations (constitution des SCI au capital modique, démembrement, augmentation de capital, absence de libération des nus-propriétaires,...), elle n'écarte cependant que le démembrement des parts de SCI via la procédure de l'abus de droit.

- l'administration ne conteste pas que les opérations ont permis le financement de la constitution d'un patrimoine immobilier pour les nus-propriétaires sans supporter directement les financements.

- l'administration ne remet pas en cause la réalité de l'opération de financement ayant permis d'acquérir un patrimoine immobilier.

- la simple absence de libération du capital des nus-propriétaires qui conduirait éventuellement à un appauvrissement de la holding au détriment de son intérêt n'est pas de nature à caractériser un montage artificiel.

La Cour relève par ailleurs que l'administration n'apporte aucun élément pour justifier d'une application littérale des textes contraire à l'intention du législateur.

Elle en conclut qu'il convient d'annuler le redressement fiscal fondé sur l'abus de droit.

CAA Paris, 28 mai 2025, n°24PA01225 et s.

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